Quand la nuit devient jour

14 mai 2016

J'aime beaucoup la plume de Sophie Jomain depuis que je l'ai découverte avec "Cherche jeune femme avisée" que j'avais beaucoup aimé. Aussi, lorsque j'ai vu sur sa page facebook qu'elle allait sortir un nouveau bouquin, j'étais ravie. Et je l'étais encore plus lorsque j'ai lu le résumé du livre qui m'a tout de suite attiré. Je me le suis procuré dans sa version numérique parce que la version papier était indisponible et que je ne pouvais pas attendre pour le découvrir ...

On m’a demandé un jour de définir ma douleur. Je sais dire ce que je ressens lorsque je m’enfonce une épine dans le pied, décrire l’échauffement d’une brûlure, parler des nœuds dans mon estomac quand j’ai trop mangé, de l’élancement lancinant d’une carie, mais je suis incapable d’expliquer ce qui me ronge de l’intérieur et qui me fait mal au-delà de toute souffrance que je connais déjà.
La dépression.
Ma faiblesse.
Le combat que je mène contre moi-même est sans fin, et personne n’est en mesure de m’aider. Dieu, la science, la médecine, même l’amour des miens a échoué. Ils m’ont perdue. Sans doute depuis le début.
J’ai vingt-neuf ans, je m’appelle Camille, je suis franco-belge, et je vais mourir dans trois mois.
Le 6 avril 2016.
Par euthanasie volontaire assistée.

Alors pfiout ... Que dire et surtout comment le dire ? J'ai donc lu ce bouquin il y a quelques jours maintenant et je ne parvenais pas à rédiger une chronique correcte. J'ai été tellement secouée, émue et bouleversée par cette lecture que c'était très difficile de mettre des mots sur mes émotions. Nous faisons donc la connaissance de Camille qui trimballe son mal être depuis toujours. Je dois bien dire que le premier chapitre dans lequel elle nous raconte toutes les étapes par lesquelles elle est passée a commencé par m'agacer. Je l'ai trouvé long et je ne comprenais pas vraiment l'intêret de tout nous déballer ainsi. Mais j'ai bien compris ensuite que tout ça était necéssaire pour que le lecteur comprenne Camille et ses réactions.

Et puis, vient le moment où Camille nous sort la carte de l'euthanasie volontaire qui est légale en Belgique et tout s'est emballé pour moi. Comme les parents de la jeune fille, j'ai commencé par contester ce choix. Je me suis dit qu'elle pouvait encore guérir, qu'elle devait encore se battre contre cette dépression chronique qui la ronge. Je ne voulais pas croire qu'elle allait réellement en passer par l'euthanasie.

Ce livre, c'est un soulévement de questions. Il nous permet de nous interroger sur notre vision de la vie et surtout de la mort. On se questionne aussi beaucoup sur comment réagir si un proche qu'on aime plus que tout nous explique qu'il (ou elle) a pris cette terrible décision et qu'elle a été acceptée par un conseil médical. Ce n'est pas un livre anodin, il fait beaucoup réfléchir le lecteur et je crois que c'est aussi pour cette raison qu'on se sent malmené et que toutes ces émotions nous tombent dessus.

Car on finit par s'attacher à Camille et aux quelques personnes qui l'entourent lorsqu'elle se prépare à mourir. J'avais tellement envie qu'elle change d'avis, qu'elle renonce à sa décision, qu'elle reprenne goût à la vie ... Je ne comprends pas très bien le phénomène des déprimes chroniques parce que je n'y suis pas sujette, je n'ai pas forcément réussi à vraiment bien appréhender de qui se passe en elle lors de ses crises. Certaines, décrites dans le livre, m'ont beaucoup impressionnées ...

Enfin, comment ne pas parler de la fin ... Bien entendu, je ne vais pas vous la dévoiler mais waouh. La claquasse ! J'en ai eu les larmes aux yeux, je ne me sentais pas bien à la lecture des dernières lignes. J'avais envie de pleurer (de joie ? de peine ? ... je vous laisse le découvrir). Sophie Jomain explose les tabous, elle se permet de parler d'un phénomène qui reste très confidentiel en France et qui met mal à l'aise beaucoup de personnes. Elle traite son sujet avec beaucoup de sensibilité. C'est une vraie réussite. Ce livre va résonner en moi pendant très longtemps ...

Un coup de coeur, lisez le sans attendre !

Lu dans le cadre du Challenge des 100 romans ...

(59/100)